Ce livre est sous-titré : Apprendre des écrivains des camps.
Peut-on guérir de la barbarie? s’interroge Daniel Oppenheim dans ce chemin initiatique qu’il nous fait partager vers l’authentique de la souffrance éprouvée par ceux qui sont partis dans les camps d’extermination, au travers des dires de ceux qui en sont revenus. Souffrance a priori indicible, puisque se situant au-delà de ce que l’humain peut dire ou tout simplement réaliser dans son intellect, tant sont grands les barrages formés par notre inconscient pour éviter à notre conscient de ressentir ce qu’il ne peut supporte. Daniel Oppenheim nous fait vivre du plus profond de nous-même ce chemin vers l’effroyable, et finalement nous fait regarder en face cette perte vertigineuse d’estime de soi imposée aux déportés, estime de soi sans laquelle aucun être humain ne peut pourtant réellement vivre. Il nous fait rencontrer cet « horrible » sans que nous ne détournions la tête, parce qu’il nous accompagne tout au long de sa quête avec une compréhension et une bienveillance du cœur qui nous donnent à la fois une protection contre cette souffrance et une passerelle pour s’en rapprocher.
Oui, nous pouvons regarder en face cette grande solitude intérieure de ceux qui ont connu les camps. Afin qu’un échange authentique avec eux soit possible, et peut-être les libère du gouffre que leur laisse « le souvenir ». Afin aussi que ce qu’ils ont vécu ne soit plus jamais oublié par nous, gens ordinaires saisis d’indifférence autant que d’ignorance. Afin que, par conséquent, plus jamais « cela » n’ait lieu : « l’horrible » organisé collectivement, politiquement, méthodiquement, techniquement, statistiquement.
Tel est ce que nous montre ce livre qui est un « acte politique » fort, comme l’indique la postface d’Antoine Garapon, magistrat connu pour sa réflexion sur le droit à partir de ses connaissances philosophiques et sociologiques, notamment sur la Shoah. Le lire est un acte incontournable de citoyen, et d’être humain tout simplement… Lorsqu’on en referme la dernière page, on n’est plus tout à fait le même, me semble-t-il. Peut-être plus humain, plus ouvert d’esprit, plus intelligent aussi…
Réserve + : Daniel Oppenheim est psychiatre et psychanalyste. Il a publié une œuvre consistante, importante, fruit de ses réflexions et de sa pratique, notamment en direction des enfants atteints de cancer.